Le centre d’art passerelle présente une exposition qui s’interroge sur la représentation des identités bretonnes – tant réelles qu’imaginaires - à travers les costumes depuis le XIXème siècle.

À travers une sélection de peintures et de gravures, datant des années 1860 à 1940,  extraites des collections du musée des beaux-arts de Brest, de films documentaires des années 30, issus de la collection de la Cinémathèque de Bretagne, sur les mœurs et coutumes en Bretagne et des vêtements des années 80 de la styliste Val Piriou, cette exposition tente de rendre compte des modes de représentations des identités bretonnes. Il n’est pas question de s’attacher à un aspect purement historique mais bel et bien de porter un regard actuel sur la façon dont les valeurs éthiques et sociales sont données à voir.

Cette exposition s’articule en plusieurs chapitres, liés à la représentation du travail, du portrait, de la religion, des fêtes et de la famille. La femme tient un rôle primordial dans les œuvres ; elle conjugue plusieurs rôles essentiels dans l’organisation sociale.

Les œuvres présentées questionnent des problématiques contemporaines liées à la codification vestimentaire. Le costume breton révèle beaucoup de choses sur la situation sociale, géographique, voire matrimoniale de l’individu. Après la Révolution Française, il est devenu le moyen d’exprimer à la fois une individualité et une appartenance à un groupe. En le regardant de plus près, on apprend mieux la Bretagne, y compris celle d’aujourd’hui qui cultive une identité locale très forte.

Dans les années 50, René-Yves Creston (artiste et ethnologue 1898-1964) recensait 66 modes différentes avec des variantes, qui représentaient des communautés aux personnalités différentes (à l’échelle d’un pays ou d’une paroisse). Le costume breton était bien plus qu’un vêtement, il était porteur de codes. Chaque coiffe avait un aspect particulier et une forme originale. Chaque costume montrait un signe extérieur de richesse. On ne sortait son costume et on ne revêtait la coiffe qu’aux grandes occasions professionnelles ou solennelles.
Les modes vestimentaires paysannes bretonnes ont commencé à décliner en 1914, au profit des habits citadins.

Les peintres de l’époque, reconnus ou anonymes, s’inspirent des scènes de la vie quotidienne locale, maritime et traditionnelle, privilégiant souvent l’illustration très réaliste de la vie paysanne même s’ils préfèrent la représentation des “beaux” costumes de fête lors des Pardons ou des scènes de marché. La clarté des compositions, la pose des personnages n’est pas sans rappeler les scènes popularisées par les cartes postales. C’est le pittoresque et le dépaysement que ces peintres recherchent en Bretagne. Certaines villes comme Concarneau, sont des foyers florissants dans la seconde moitié du XIXe où le thème breton fait les belles heures des salons parisiens.

L’ambition de cette exposition n’est pas tant de chercher à présenter les différents costumes, mais plutôt d’apporter un regard sur les représentations et la construction des identités bretonnes et des valeurs sociales, à travers les expressions plastiques (peintures, gravures, dessins), le film et la mode contemporaine.

Le costume traditionnel breton, ses couleurs, ses savoir-faire et ses matériaux sont loin d’avoir disparus. Bien au contraire, la mode bretonne d’hier est devenue source d’inspiration pour les créateurs contemporains.

Dans les années 1990, la quimpéroise Val Piriou, décédée prématurément en 1995, s’était déjà illustrée dans le domaine de la haute-couture à travers sa propre marque créée à Londres, largement inspirée par le costume traditionnel breton du XIXe. Elle a su lui donner une nouvelle vie et une démesure en puisant dans un patrimoine textile immense et encore peu exploité. A l’instar des défilés de Jean Paul Gaultier ou de Christian Lacroix, eux aussi influencés par les costumes des bigoudènes, Val Piriou a su bien avant, voir en ces costumes typiques, une poésie, une création, un potentiel de mode.