Polyregard in the dark
Anita Gauran visite des musées et des sites archéologiques munie d’un appareil argentique. De retour dans l’atelier, pas de photoshopage ni d’impression numérique donc, mais un travail patient dans la chambre noire dont elle ressort des épreuves qu’elle a révélées de ses propres mains. Si on rencontre des bustes antiques et des bas-relief médiévaux, l’œuvre d’Anita Gauran n’est pas anachronique mais au contraire, militante. En effet, son attitude est singulière au sein d’une génération qui poursuit intensément la pratique de l’appropriation d’images maintenant que toutes sont disponibles sur le web : ce catalogue infini de colonnes grecques qui jalonnent étrangement l’esthétique dite « post-internet ».
Et son approche n’a rien de nostalgique ou de romantique, pour preuve les traitements qu’elle fait subir à ses images sources, quand les grotesques sont affublés de masques de mardi gras, les Apollons de chaînettes de teenagers ou qu’apparaissent dans d’autres rayogrammes bouteilles en plastiques, teddy bears… Il serait erroné de voir cependant, dans ce caviardage par insolation sur des vestiges une énième manifestation d’une critique institutionnelle (l’anachronisme n’a rien à voir non plus avec la redondance). Mais l’artiste a hérité de cette énigme solidement enchâssée dans le phénomène d’apparition des images des avant-gardes qui pratiquaient le montage ou des manipulations critiques des appropriationnistes dans les années 1970.
Aussi le rayogramme, la prise d’empreinte ou le transfert fonctionnent-ils symboliquement comme autant de techniques d’auscultation dans ce qui pourrait être un processus de révélation... [lire plus]
D’après un texte de Julie Portier
Le projet d'Anita Guaran a été développé dans le cadre des Chantiers– Résidence, programme de soutien aux artistes émergents en Bretagne mené par Passerelle Centre d’art contemporain, Brest et Documents d’Artistes Bretagne.